Dans un environnement médiatique en perpétuelle transformation, où la rapidité de l'information rivalise avec la nécessité de sa véracité, le rapport entre journalistes et professionnels des relations presse s'adapte et évolue. À l'occasion de la publication du Rapport State Of The Media 2025, Com’On Leaders a souhaité donner la parole à ceux qui façonnent chaque jour l'information.
Quelles sont les attentes des journalistes face aux RP ? Comment l'essor des nouvelles technologies, telles que l'intelligence artificielle, les médias sociaux influencent-ils leur métier ? Et surtout, comment les RP peuvent-ils mieux répondre à leurs besoins dans un contexte avec lequel la confiance reste un enjeu clé ?
La parole est à Marie-Laure Laville, Founder MLD Consulting Agency.
Au regard des résultats de l’étude SOTM 2025, entre IA et fragmentation des médias, quels sont les doutes, interrogations et défis des attaché(e)s de presse pour mieux communiquer avec les journalistes dans un monde en pleine mutation ?
Dans un paysage médiatique en constante évolution, les attaché(e)s de presse sont confronté(e)s à une série de défis majeurs pour maintenir une communication efficace avec les journalistes.
Depuis la pandémie de Covid-19, il est devenu plus difficile d’entrer directement en contact avec les journalistes. L’accès à leurs coordonnées personnelles, comme un numéro de portable, s’avère souvent crucial. Sans ce lien direct, les échanges peuvent se heurter à des silences ou à des filtres, rendant la prise de contact par email d’autant plus stratégique. Dans ce contexte, capter leur attention dès la ligne d’objet devient un véritable enjeu.
L’étude SOTM 2025 souligne un impératif devenu incontournable : pour sortir du lot, le pitch doit être à la fois percutant, synthétique, et appuyé par des données fiables. La crédibilité d’un message repose aujourd’hui sur la force de ses preuves, particulièrement à travers des statistiques solides ou des éléments chiffrés.
Parallèlement, les journalistes eux-mêmes modifient leurs modes de consommation de l’information. Submergés par une profusion de contenus, ils recherchent davantage de clarté, de concision, mais aussi des formats innovants, visuels ou immersifs. Cette évolution impose aux attaché(e)s de presse de réinventer leur manière de communiquer pour rester pertinents.
Comment réagissez-vous à l’inquiétude des journalistes sur l’utilisation de l’IA par les professionnels des RP, pour la génération de communiqués de presse ou de pitchs ?
Les inquiétudes des journalistes vis-à-vis de l’utilisation de l’intelligence artificielle dans les contenus générés par les professionnels des relations presse sont fondées et légitimes.
Si l’IA peut être un formidable levier de productivité en structurant un pitch, en synthétisant une information ou en identifiant des tendances émergentes elle reste sujette à des limites critiques. Les fameuses « hallucinations » de l’IA, c’est-à-dire les erreurs factuelles ou les données inventées, représentent une menace directe pour la fiabilité des contenus.
C’est pourquoi tout contenu généré par une IA doit impérativement être relu, vérifié, et enrichi par un professionnel expérimenté. L’IA ne peut ni remplacer l’intelligence humaine ni comprendre les subtilités des attentes journalistiques ou des contextes sectoriels. Elle doit donc rester un outil d’assistance, et non un substitut à l’expertise stratégique.
L’IA ne doit pas remplacer l’expertise humaine, mais plutôt la soutenir. C’est à cette condition qu’elle pourra trouver une place légitime dans les pratiques des attaché(e)s de presse.
Quelles plateformes sociales utilisez-vous dans le cadre de votre travail (publication de contenu, veille, réseautage…) et pour quels usages en priorité, notamment pour prendre contact avec les journalistes ou publier des contenus pour vos clients ?
Dans le cadre de leur travail, les attaché(e)s de presse utilisent les réseaux sociaux comme leviers à plusieurs niveaux : veille stratégique, publication de contenus, et surtout prise de contact avec les journalistes.
Parmi ces plateformes, LinkedIn s’impose comme l’outil le plus efficace pour initier un premier lien, repérer les tendances ou suivre les appels à témoins publiés par les journalistes. C’est également un espace propice pour valoriser des contenus clients et construire une image experte.
L’étude montre que 96 % des journalistes utilisent les réseaux sociaux dans leur quotidien professionnel : pour promouvoir leurs articles (64 %), interagir avec leur audience (55 %), ou encore nourrir leurs recherches (51 %). LinkedIn est désormais en tête au niveau mondial (+20 points par rapport à 2024), suivi de Facebook (+19 points), Instagram (+7 points) et X (ex-Twitter), qui reprend des couleurs. YouTube reste également significatif dans certains usages.
Ces chiffres confirment l’intérêt pour les professionnels des RP à renforcer leur présence sur ces plateformes, en particulier LinkedIn, pour tisser leur réseau, affiner leur veille et assurer la visibilité de leurs messages.
Quelles sont vos attentes, challenges, vos doutes et interrogations, face à l’utilisation de l’IA et notamment vis-à-vis du combat contre la désinformation ? Avez-vous des attentes et/ou des craintes face à ce développement, spécialement via les agences RP ou par l’utilisation de l’IA par les communicants et les marques sans passer par une agence ?
L’essor de l’intelligence artificielle dans les métiers de la communication suscite autant d’attentes que de préoccupations, en particulier sur le terrain sensible de la désinformation.
Le principal risque : la diffusion involontaire de contenus erronés ou biaisés. Une simple erreur dans un communiqué ou une donnée inventée peut nuire à la crédibilité de tout un message voire entacher durablement la réputation d’une entreprise ou d’un porte-parole.
Autre enjeu : le contournement de l’expertise humaine. Lorsque les marques utilisent l’IA sans passer par une agence ou un professionnel, elles risquent de produire des contenus décontextualisés, génériques, ou inadaptés aux attentes des médias. Or, la véritable valeur ajoutée des RP repose sur une fine connaissance des angles journalistiques, des timings éditoriaux et des spécificités de chaque média.
Face à ces défis, les attentes sont claires : que l’IA reste un outil au service de la stratégie, sous le contrôle d’un regard humain. Elle peut accélérer la veille, optimiser des formats, ou aider à structurer des messages, mais jamais se substituer à la réflexion critique et à l’éthique professionnelle.
Les agences ont ici un rôle central à jouer : garantir la fiabilité des contenus diffusés, instaurer des protocoles de vérification, et faire de l’IA un levier maîtrisé et responsable. Dans un monde saturé d’informations, la transparence, la véracité et la rigueur sont plus que jamais des piliers essentiels.
Conclusion : une transformation profonde du journalisme et des RP.
L’année 2025 marque un tournant. À l’échelle mondiale, le principal défi n’est plus le manque de ressources humaines, mais bien l’adaptation aux nouveaux modes de consommation de l’information (42 %), devant la lutte contre les « fake news » (40 %) et la montée de l’IA (30 %).
L’usage massif des réseaux sociaux (96 % des journalistes) et l’ascension de plateformes comme LinkedIn confirment l’importance, pour les attaché(e)s de presse, d’adapter leurs pratiques. Dans ce contexte mouvant, la collaboration entre intelligence humaine et outils d’IA, encadrée par une éthique rigoureuse, représente une opportunité unique : celle de construire une information plus claire, plus crédible, et véritablement connectée aux besoins des journalistes.
Etude monde 2025 : Rapport sur l’État des Médias
Les journalistes Nord-Américains les plus réfractaires à l’IA, prédominance de LinkedIn et arrivée de Bluesky dans les usages réseaux sociaux : le rapport State Of The Media 2025 réserve quelques surprises…
Le rapport sur l'état des médias de Cision est un guide pratique essentiel pour les professionnels des RP qui tentent de comprendre le paysage médiatique. Comme chaque année et pour la 16ème édition, Cision a interrogé plus de 3 000 journalistes à travers le monde pour dresser un état des lieux de la profession et connaître leurs sentiments sur l’évolution de leur métier.
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