Dans un environnement médiatique en perpétuelle transformation, où la rapidité de l'information rivalise avec la nécessité de sa véracité, le rapport entre journalistes et professionnels des relations presse s'adapte et évolue. À l'occasion de la publication du Rapport State Of The Media 2025, Com’On Leaders a souhaité donner la parole à ceux qui façonnent chaque jour l'information.

Quelles sont les attentes des journalistes face aux RP ? Comment l'essor des nouvelles technologies, telles que l'intelligence artificielle, les médias sociaux influencent-ils leur métier ? Et surtout, comment les RP peuvent-ils mieux répondre à leurs besoins dans un contexte avec lequel la confiance reste un enjeu clé ?

La parole est à Solène Mauro, Fondatrice Sonare RP.

Au regard des résultats de l’étude SOTM 2025, entre IA et fragmentation des médias, quels sont les doutes, interrogations et défis des attaché(e)s de presse pour mieux communiquer avec les journalistes dans un monde en pleine mutation ?

Clairement, oui. On sent que les journalistes ne consomment plus l’information comme avant​, et c’est​ totalement compréhensible quand on voit le volume de contenus, de formats et de canaux qu’ils reçoivent chaque jour. De notre côté, ça nous oblige à aller à l’essentiel, à être plus pertinents, plus ciblés, et à penser « usage » avant même de penser « message ». Chaque pitch, chaque communiqué doit être pensé pour la bonne personne, au bon moment, via le bon canal.

​Dans ce contexte, le lien humain reste​ notre meilleure ​f​orce : on ne parle plus à « la presse » de manière générale. On s’adresse à des journalistes qu’on connaît, qu’on suit, avec qui on échange. Et ça fait toute la différence.

56 % des journalistes se disent opposés aux communiqués de presse générés par l’IA, 30 % d’entre eux sont ouverts à des contenus bien construits, à condition qu’ils soient édités et validés par un humain. Comment réagissez-vous à l’inquiétude des journalistes sur l’utilisation de l’IA par les professionnels des RP, pour la génération de communiqué de presse ou de pitchs ?

Je comprends l'inquiétude des journalistes sur l'utilisation de l'IA, surtout si elle devient excessive ou automatique. Mais si elle est utilisée à bon escient, l'IA peut-être une vraie alliée. Elle m’aide à gagner un temps précieux au quotidien sous ma casquette d'entrepreneur, mais aussi en RP : pour reformuler un pitch, synthétiser une actu ou m’aider à trouver un angle plus clair, plus direct. Et ça compte quand on sait à quel point les journalistes sont sursollicités.

Mais on ne remplacera jamais le regard humain.

Dans les RP, on raconte des histoires, on personnalise nos envois, on tisse du lien… et ça, l’IA ne sait pas le faire comme nous.

Quelles plateformes sociales utilisez-vous dans le cadre de votre travail (publication de contenu, veille, réseautage…) et pour quels usages en priorité, notamment pour prendre contact avec les journalistes ou publier des contenus pour vos clients ?

LinkedIn est la plateforme que j’utilise le plus au travail, à la fois pour faire de la veille, trouver des journalistes pertinents par rapport à mes sujets, pour établir des premiers contacts, ou encore valoriser des projets clients. C'est un réel outil de travail pour moi.

J’utilise aussi Instagram dans une logique de contenu plus visuel et engageant (notamment pour les artistes et événements culturels que j’accompagne).

Ce qui est assez particulier, pour nous, attachés de presse, c’est que l’on doit adopter une stratégie à double entrée : d’un côté, mettre en avant nos clients et les projets que l’on accompagne ; de l’autre, valoriser notre propre travail (les retombées obtenues, nos méthodes, notre posture...). Cette visibilité est utile à plusieurs niveaux : elle permet aux journalistes de repérer les sujets sur lesquels on travaille, et elle nourrit aussi le lien avec notre écosystème professionnel (clients actuels, anciens, prospects…).

Évidemment, tout cela doit s’adapter aux codes de chaque réseau. Mais on compose aussi avec les algorithmes, qui rendent la visibilité d’un post parfois imprévisible. On peut avoir un message pertinent, bien écrit, et pourtant passer complètement à côté de la cible si le format, le timing ou la fréquence ne collent pas. Cela nous pousse à réfléchir, à tester, à optimiser… tout en gardant en tête que ce ne sont pas les chiffres qui font la qualité d’une communication.

C’est pour ça que, malgré tous les outils, je reviens toujours à l’essentiel : un message clair, sincère, envoyé à la bonne personne, au bon moment.

Le lien humain, le contact direct, la personnalisation restent irremplaçables... en tout cas dans ma façon de travailler.

Quelles sont vos attentes, challenges, vos doutes et interrogations, face à l’utilisation de l’IA et notamment vis-à-vis du combat contre la désinformation ? Avez-vous des attentes et/ou des craintes face à ce développement, spécialement via les agences RP ou par l’utilisation de l’IA par les communicants et les marques sans passer par une agence ? 

Ma crainte principale, ce n’est pas l’IA en soi, mais la façon dont elle est utilisée. Si elle devient un moyen de produire à la chaîne des contenus sans filtre, sans relecture, sans intention claire… on risque de tomber dans la saturation, voire dans la défiance.

C’est justement là que notre rôle prend tout son sens. En tant que professionnels des RP, on est garants de la qualité, de la crédibilité, du sens des messages qu’on diffuse. L’IA peut nous accompagner, oui (elle le fait déjà au quotidien) mais elle ne remplace pas notre sens critique, ni notre capacité à ajuster le ton, l’angle ou le format selon le média.

Notre valeur, c’est de produire juste, pas de produire plus.

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