L’information, si elle n’est déjà plus attendue au 20h, peut provenir aujourd’hui de n’importe où – nouveaux médias indépendants, Twitter, Facebook…- et le journaliste est devenu de fait multicartes (Web, Print, TV, Radio). L’effondrement de la presse écrite, la montée du Web, la place des réseaux sociaux dans notre rapport à l’information, redistribuent les cartes et poussent les journalistes à réinventer leur métier, leurs valeurs, leurs médias.

Cette remise en question ne semble pourtant pas avoir autant d’écho auprès des attachés de presse. En effet, beaucoup n’ont pas encore fait évoluer leurs pratiques vers les nouveaux médias et s’éloignent petit à petit des attentes des journalistes mais aussi sans doute de celles de leurs clients.

Pourtant la visibilité Web, d’abord sur Google, et l’influence d’une entreprise à travers les réseaux sociaux devraient être des objectifs clairs pour chacune des parties.

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Cision, en partenariat avec le Press Club de France, a interrogé trois grands journalistes sur ce sujet : Hubert COUDURIER, Directeur de l’information du Télégramme, Patrick ROGER, Journaliste-présentateur des grandes éditions, ex-directeur de la rédaction d’Europe 1 et Christophe BYS Journaliste management, ressources humaines à l’Usine Nouvelle

 

Pratiques journalistiques d’aujourd’hui

 

Patrick Roger et Christophe Bys mettent tous deux en relief que les réseaux sociaux poussent les journalistes à être plus productifs, qu’ils couvrent de plus en plus de sujets. De ce fait, ils n’ont plus le temps de répondre présents aux invitations presse des attaché(e)s de presse.

Pour Hubert Coudurier, il n y a pas d’ «  effondrement » de la presse,  puisque grâce à internet, beaucoup de medias ont vu leur audience augmenter en combinant support papier et support en ligne. Mais le métier a changé, car les journalistes ne se contentent pas seulement d’écrire un article. Ils doivent également filmer, prendre des photos, s’occuper de la mise en page, écrire des brèves, participer à un plateau télé … Des missions qui ne sont pas accessibles par tous les journalistes, en particulier ceux habitués à la presse print.

Le plus gros problème des journalistes aujourd’hui est le choix entre la qualité et quantité. Faut-il écrire plus de brèves et moins d’articles d’investigation ?

« Le journaliste nouvelle génération a une peur du vide, qui se traduit par l’insatiable flux d’information à produire, tant sur son media que sur Twitter»

Le journalisme est également devenu plus ludique selon lui. Il donne l’exemple de la chaîne Youtube «  Les questions cons », créée par le journaliste Hugo, qui enregistre plus d’un million d’abonnés. Le ludique marche, mais il ne faut pas oublier le savoir-faire du journaliste, ne pas oublier sa mission de relai d’opinion, sa mission de critique.

« Le sérieux du journaliste n’est pas gage de ringardise »

Patrick Roger est plus direct. Selon lui, «  Il faut se rendre à l’évidence. Les métiers de journaliste et d’attaché de presse sont morts. Mais ils ont ressuscité, en se réinventant ».

Il ajoute qu’aujourd’hui, les journalistes changent de medias très fréquemment. Ils ne restent pas 10ans dans la même rédaction, comme c’était le cas il y a quelques années. De ce fait, les fichiers presse des attachés de presse deviennent obsolètes très rapidement.

Pour les trois journalistes, la nouvelle génération est plus sédentaire, elle se déplace moins sur le terrain, mais trouve ses sources sur le net.

 

Comment les attachés de presse devraient s’adapter ?

 

Selon Mr Coudurier, ce qui a profondément changé le monde des relations presse, c’est la démocratisation de la communication.

«  Tout le monde a droit à ses 15 minutes de célébrité » - Andy Wharol

Chacun est persuadé qu’il doit se faire entendre, qu’il a quelque chose à dire. Tout le monde a le même droit de parole grâce au web 2.0. Et cette possibilité séduit beaucoup d’entreprises, qui décident de communiquer par elles-mêmes sur leur activité. Une certaine vendetta contre les journalistes qui ont été trop critiques.

Il devient donc difficile pour les attachés de presse de se faire entendre au milieu de tout ce bruit. Mais les réseaux sociaux ne sont pas à bouder pour autant. En effet, selon une étude Cision, 91% des journalistes utilisent les réseaux sociaux dans le cadre de leur travail et 20% des journalistes déclarent susciter plus d’intérêt aux sollicitations des attachés de presse sur les réseaux sociaux. Un phénomène normal selon Patrick Roger, puisque pendant la conférence il avait déjà reçu 60 communiqués de presse par email en moins d’une heure.

Les trois journalistes s’accordent sur le fait que les attachés de presse négligent encore trop le ciblage. Peut-être parce que leurs clients ne comprennent pas que les relations presse sont une stratégie à long terme et non pas à court terme, et qu’ils veulent des résultats tout de suite. Pourtant, un mauvais ciblage conduit à se faire blacklister.
Les trois journalistes croient profondément au partage et aux relations humaines.

On ne crée pas une relation de confiance entre un attaché de presse et un journaliste en un jour, il faut du temps. Et c’est cette confiance qui est déterminante dans les relations presse.

De plus, beaucoup de communiqués de presse sont trop marketing et pas assez informationnels selon Patrick Roger. Pas étonnant lorsqu’on voit que 62% des marketeurs rédigent des communiqués de presse, selon une étude Cision sur l’influence réalisée en mars 2016.

Cependant, le marketing ne doit pas être négligé.

Les marketeurs créent des contenus très variés, et les attachés de presse devraient s’en inspirer. Les journalistes ont besoin de visuels pour leurs articles, de vidéos. Les attachés de presse devraient varier leurs contenus en créant infographies, vidéos, visuels…

S’adapter à la nouvelle presse comme l’ont fait les journalistes, en somme.

Enfin, les attachés de presse ne doivent pas oublier qu’aujourd’hui, leur métier ne s’arrête pas à avoir une retombée. En effet, leur but est de développer la visibilité medias de leurs clients, et ce dans tous les medias. C’est pourquoi il est important qu’elles partagent sur les réseaux sociaux les retombées qu’ils ont eues. C’est important pour développer la notoriété de leurs clients mais également pour les journalistes, qui ont de plus en plus le « réflexe  Google Analytics », en surveillant le nombre de vues que génèrent leurs articles.

Le partage est gagnant pour tous.

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